D'une certaine façon, Fauve aura été volontairement le grand absent du 30ème anniversaire des Victoires de la musique, survenu le week end précédant la sortie de Vieux Frères - Partie 2. Le collectif n'aurait de toutes façons pas pu rivaliser avec le bien plus consensuel Christine and the Queens, vainqueur sans surprise de cet anniversaire convenu. Il faut dire qu'au delà de son auto-mise à l'écart, Fauve dérange, Fauve intrigue et Fauve ne convainc pas toujours entièrement.
Fauve est finalement surtout expérimental. Il n'appartient véritablement à aucun style musical tout en pouvant piocher dans une palette qui peut aussi bien avoir des touches de musique classique, de rock, de slam, de rap ou de musiques du monde. Car chez Fauve, il semblerait que l'essentiel soit plus dans les paroles que dans l'instrumentation, des textes souvent durs déclamés avec des voix volontiers déprimées qui en renforcent l'aspect nauséeux. Vieux Frères - Partie 2 n'est pas une partie de plaisir ni de campagne, c'est plutôt un condensé étouffant du quotidien orwellien qui est celui de ses contemporains.
Réplique à la musique de divertissement, Fauve fournit une sorte d'anti-matière à « Happy » ou « Get Lucky ». Ici on ne s'amuse pas monsieur : on pense et on souffre. Cette posture nihiliste donne tout son éclat à des chansons comme « Sous les arcades », qui possède effectivement une bonne part de rock dans son essence. Une guitare chétive et agressive est du reste le seul instrument qui ressort vraiment dans la musique de Fauve. Les sens toujours acérés, Fauve est aussi capable de poser ses maux sur la trame minimaliste de « Juillet (1998) ».
Ce que propose Fauve est autre chose que de la musique. C'est un magma de mots, d'émotions, d'idées qu'il donne en partage brut au reste du monde. Une forme de réseau social d'un mal-être désabusé mais à la conscience aiguë.
François Alvarez - Copyright 2015 Music Story
